Le double littéraire, présent depuis l’Antiquité, rencontre au début du XIXe siècle un succès indéniable ; il permet de parler de la complexité de l’identité individuelle en creusant l’intériorité du sujet. La littérature fantastique, qui s’étonnait de faire se rejoindre les différentes facettes du monde, laisse place à une banalisation de cette appréhension multifocale du monde. L’esprit positiviste, nourri par la biologie et la psychiatrie, s’allie à une conception de la représentation littéraire du monde qui n’est plus mimétique. Ainsi la représentation romanesque de la vérité ne se soucie-t-elle, à la fin de ce siècle, non plus tant de vraisemblance que de vérité. Au XXe siècle, le retour au souci de vraisemblance se fera sur le postulat que ce qui est unitaire est suspect. Le double romantique, inouï et surprenant, n’est plus de mise. S’il avait à l’époque permis de penser l’identité, cette extériorisation de la multiplicité du sujet n’est plus acceptable. Au XXe siècle et jusqu’à nos jours, la littérature reste fascinée par le double, qu’elle multiplie à l’envi, mais pour en faire une réalité normale. Les personnages contemporains n’ont plus un double : ils sont dédoublés, multiples.